Etudiant à Central Saint Martins, lauréat du Grand Prix Scholarship LVMH en 2015 et du Sophie Hallette Award en 2016, le jeune Ukrainien Sergiy Grechyshkin revendique n’avoir jamais fréquenté auparavant d’école d’Art ou de mode. Une fraîcheur dont il a tiré sa force, lui permettant de développer une pratique du design qu’il décrit comme « expérimentale et spontanée ». Son talent n’a pas échappé à Sophie Hallette, qui l’a soutenu pour les silhouettes toutes en dentelle présentées lors du show presse de l’école. Conversation avec un jeune homme aussi doué que déterminé.
Votre projet en quelques mots…
L’aspect recherche de mon projet est basé sur le rituel des bacchanales, dont les éléments sont présents dans de nombreuses cultures et époques. J’ai particulièrement regardé les années 20 et leurs flapper girls, non seulement pour les formes, les silhouettes et les couleurs, mais également pour l’attitude. En utilisant des objets de la vie de tous les jours, j’ai fait tout un tas d’expérimentations spontanées, en m’inspirant du style de peinture chaotique de Cy Twombly. J’ai recherché des matériaux qui pourraient m’aider à exprimer le danger et la fragilité, comme la porcelaine, le filet, la dentelle, les fleurs en papier découpé etc. J’ai aussi développé des accessoires pour représenter la violence et le cannibalisme, qui s’inscrivent également dans le thème des bacchanales. Le point central de ma collection n’est pas uniquement sur les couleurs et les silhouettes, mais le mélange d’un look féminin et d’une attitude masculine. Le mouvement du vêtement et des accessoires sont aussi très importants.
Pourquoi la dentelle ?
Historiquement, la dentelle a toujours été considérée comme un matériau de luxe, en raison de son prix et de sa beauté. Le savoir-faire et le temps qu’il faut pour la fabriquer la rendent tellement précieuse. Dans une société où tout va très vite, nous essayons tous de posséder quelque chose d’unique et de spécial, mais aussi de plus en plus des objets « slow ». Dès le début de mon projet j’ai recherché des matériaux qui représentaient le danger et la fragilité, et la dentelle semblait un choix parfait. Les qualités de couleur de la dentelle ont également beaucoup influencé mon choix.
A propos de votre travail singulier sur la dentelle…
Je trouve très ennuyeux d’utiliser des méthodes conventionnelles d’utilisation des matériaux, surtout avec ceux qui ont déjà une grande histoire et une grande tradition derrière eux. J’ai donc essayé de transformer l’apparence de la dentelle, de ne pas l’utiliser uniquement pour le côté décoratif. Je voulais vraiment montrer sa beauté, et la construction de mes vêtements m’a aidé à le faire au mieux. J’ai étiré la dentelle sur des cadres très légers, et l’ai incorporée aux silhouettes.
Le futur proche… et lointain
[A la veille du défilé] Mon plus grand souhait serait de dormir, maintenant. Je suis tellement excité de voir la collection en mouvement, car cela a été de longs mois de dur travail au sein du studio. J’aimerais donc pouvoir m’asseoir et me relaxer un peu. Mais surtout, j’ai très envie de voir ce qu’ont fait mes camarades, puisqu’on ne voit jamais le travail des autres terminé. Et pour plus tard… J’ai de grandes ambitions, mais j’aimerais démarrer ma carrière au sein d’une marque établie, et créer quelque chose de plus personnel plus tard. J’ai une idée de business que j’aimerais développer un jour.